EXTRAIT

LAÏOS

Laïos, Séquence 2 (L’éloge du printemps). Chœur

Duo de Jocaste et Niobé, suite, prolongé par le chant du chœur : le printemps.

Le Chœur

Mousses naissantes et nourrissantes, dévorant les chairs défuntes du temps ; le monde est neuf. Bourgeons abondants, turgescence, éclatements, éclatements. Voici l’augure du printemps.

Nuées, ô nuées, grêlons, oiseaux étranges, cendres fécondes et toi ciel si haut chutant sur la terre et sur son ventre accueillant, pour faire surgir humeurs et senteurs, rumeurs et tremblements. Fécondation, fécondation, splendeur des râles, voici venir les grandes plaintes du printemps.

Les fleurs tendres des colonnades vertes hurlent leur romance. La primevère pousse sur les excréments des vivants ; les jonquilles, le jasmin, les folles pensées, dans la main levée du temps, font effraction dans le vent des germinations du printemps.

Les verges de fer plantées dans le cœur reconnaissant des terres s’exaspèrent. La dent pointue du soc fend et retourne les mottes réclamant semence et pitance. Grande impatience devant l’exclamation du printemps.

Gerçures du temps, la terre se gonfle, les blés se lèvent, toutes fleurs cisaillent le vent. L’herbe pousse, les pierres se fendent. Sur leurs visages sans nom, rampent les craquelures vertes du temps. Jubilation. Jubilation. C’est la sève terrible des larges entrailles du printemps.

Bienveillance des craquements à la surface des lacs, rupture des eaux frémissantes. Grêle et vent, les cerisiers sont blancs. Les chevaux hennissent. Génisse génitrice, l’épieu du taureau t’attend. Grand parfum, des semences du printemps.

Marécages fumants autour des caresses des ajoncs ; globules, couleurs, bulles, profusion, boues vivantes, vie vivace des pourrissements faisant outrage à la mort, voici le grand courage du printemps.

Arrêt du chant.

Danse bachique du chœur. Laïos se mêle à la danse.

© Farid Paya